La charte informatique n’est pas opposable au salarié qui n’en a pas eu connaissance !

Un arrêt récent de la Cour d’appel de Paris (CA Paris, pôle 6, ch. 8, 25 nov. 2020, n° 17/09132 – reproduit ci-dessous) écarte comme irrecevable le mode de preuve consistant en un listing de connexions informatiques produit en justice par l’employeur ayant servi de fondement au licenciement d’un salarié pour utilisation abusive de son ordinateur et des outils professionnels à des fins personnelles pendant le temps de travail, au motif que la charte informatique de l’entreprise concernée n’était pas opposable au salarié qui n’en avait pas eu connaissance. La Cour en profite également pour rappeler les conditions d’opposabilité aux salariés de la charte informatique.

 

 

Les règles générales applicables aux moyens de contrôle de l’activité des salariés

 

Dans son arrêt du 25 novembre 2020, la Cour d’appel de Paris rappelle les règles applicables aux moyens de contrôle utilisés par l’employeur.

 

Les faits concernent un salarié licencié pour avoir fait un usage qui serait abusif de son ordinateur à des fins personnelles, en passant plus de temps sur Internet à des fins personnelles qu’à effectuer son travail alors que la charte informatique de la société concernée prévoyait que les salariés ne pouvaient utiliser Internet à des fins privées que dans des proportions raisonnables. L’employeur avait détecté ces connexions privées excessives du salarié par le biais de contrôles effectués sur les listings (ou journaux) de logs de connexion issus du système d’information de l’entreprise, listings sur lesquels il se fondait pour rapporter en justice la preuve desdites connexion.

 

Tout d’abord, la Cour d’appel se fonde sur l’article L.1121-1 du Code du travail en vertu duquel nul ne peut apporter aux droits des personnes et aux libertés individuelles et collectives des restrictions qui ne seraient pas justifiées par la nature de la tâche à accomplir ni proportionnées au but recherché. En l’occurrence, elle précise donc que « les moyens de contrôle utilisés ne doivent pas apporter aux droits et libertés des salariés des restrictions non proportionnées ni justifiées par la tâche à accomplir ».

 

Ensuite, les magistrats rappellent qu’en vertu de l’article L.1222-4 du même code, une information concernant personnellement un salarié ne peut être collectée par un dispositif qui n’a pas été porté préalablement à sa connaissance. S’agissant des moyens de contrôle ici utilisés par l’employeur, « les salariés doivent être informés notamment de la finalité du dispositif de contrôle et de la durée pendant laquelle les données de connexion à internet sont conservées ».

 

Enfin, en vertu de l’ancien article L.2323-32 (actuel article L.2312-38) du même code, la Cour d’appel relève pour mémoire que le comité d’entreprise (devenu depuis le comité social et économique ou « CSE ») doit être informé et consulté, préalablement à la décision de mise en œuvre dans l’entreprise, sur les moyens ou les techniques permettant un contrôle de l’activité des salariés.

 

Le moyen de contrôle de l’activité des salariés qui ne respecterait pas ces règles serait illicite.

 

 

L’opposabilité de la charte informatique conditionnée par l’information explicite du salarié

 

Pour ce qui concerne plus spécifiquement l’information préalable devant être portée à l’attention des salariés s’agissant des moyens de contrôle utilisés au sein d’une entreprise, la Cour d’appel ajoute que si l’employeur est susceptible de prendre une mesure disciplinaire en se fondant sur des fichiers qu’il a conservés et examinés, par exemple sur un listing de connexions informatiques, « les salariés doivent en être explicitement informés, par exemple, au moyen d’une charte ».

 

Si cette information peut donc se faire par l’établissement d’une charte informatique, elle doit néanmoins être personnelle et explicite, ce dont il résulte que ladite charte pour être opposable aux salariés doit avoir été portée à la connaissance de ces derniers de manière spécifique et l’employeur doit être en mesure de le prouver.

 

En l’espèce, les juges relèvent que la charte informatique de la société prévoyait effectivement que les salariés ne pouvaient utiliser l’Internet à des fins privées que dans des proportions raisonnables et que l’employeur conservait les caractéristiques techniques, ainsi que la date, l’horaire et la durée de chaque communication. Ils précisent néanmoins que cette charte n’avait pas été signée par le salarié licencié.

 

La Cour d’appel ajoute que :

  • la charte informatique n’avait pas été annexée au contrat de travail dudit salarié ni au règlement intérieur de la société ;
  • la mise en ligne de la charte sur l’intranet de l’entreprise ne saurait suffire pour satisfaire à l’obligation d’information du salarié. En effet, une telle pratique constitue davantage une information collective que personnelle et explicite (étant précisé que si une information collective ne peut remplacer une information individuelle, elle peut toutefois utilement l’accompagner).

 

Par ailleurs, le salarié doit avoir eu connaissance de la charte au moment des faits qui lui sont reprochés. L’employeur ne saurait donc utilement avancer que le salarié avait bien connaissance de la charte puisqu’il la verse au débat dans le cadre d’une action en justice.

 

Ainsi, retenant qu’il n’avait pas été satisfait à l’exigence de l’information personnelle et explicite des salariés, les juges considèrent que les fichiers examinés et conservés par l’employeur, notamment le listing de connexions informatiques, ne peuvent servir de fondement à une mesure disciplinaire prise à l’encontre du salarié car ils lui sont inopposables et constituent des moyens de preuve illicites et irrecevables.

 

La mesure disciplinaire prononcée et critiquée en l’espèce étant un licenciement, ledit licenciement est jugé sans cause réelle et sérieuse dans la mesure où les autres griefs du licenciement ne sont pas établis.

 

 

Les enjeux de la mise en place d’une charte informatique au sein de l’entreprise

 

Face à l’usage croissant et nécessaire des technologies de l’information et de la communication au travail (ordinateur, smartphone, tablette, logiciels, messagerie électronique, etc.), la mise en place d’une charte informatique est de plus en plus fréquente et devient en tout état de cause indispensable !

 

Elle permet d’encadrer et de sécuriser l’usage des ressources et moyens informatiques et de communications mis à disposition du salarié par son employeur en fixant les droits et obligations opposables au salarié et les sanctions disciplinaires encourues par ce dernier en cas de non-respect de la charte.

 

L’élaboration d’une charte informatique permet en outre à l’employeur d’informer ses salariés sur les moyens de contrôle utilisés, préalable nécessaire pour l’employeur aux fins de se constituer des preuves recevables en cas de litige.

 

Une telle charte peut notamment venir préciser : les modalités d’accès et d’authentification des utilisateurs aux outils et au système d’information, les modalités d’utilisation des moyens informatiques et de télécommunications mis à disposition comme par exemple le poste de travail, la messagerie électronique, la téléphonie ou les espaces de stockage, ainsi que les conditions d’administration du système d’information, et l’existence, le cas échéant, de systèmes automatiques de filtrage ou de traçabilité, et plus généralement de tous dispositifs de contrôle des salariés et leurs finalités d’utilisation (en particulier le fait qu’ils peuvent être utilisés par l’employeur aux fins de rapporter la preuve des manquements d’un salarié aux obligations à la charge de ce dernier) et, enfin, les responsabilités et sanctions encourues en cas de non-respect de la charte.

 

Néanmoins, aux fins de répondre aux objectifs précités, les stipulations de la charte informatique doivent être portées à la connaissance des salariés et être rendues opposables à ces derniers, ce que l’arrêt d’espèce rappelle fort à propos.

 

En pratique, il est fortement recommandé d’intégrer ou d’annexer une telle charte informatique au règlement intérieur de l’entreprise, étant précisé qu’elle devra alors pour ce faire être soumise à l’avis du CSE, être déposée au greffe du conseil de Prud’hommes et être transmise à l’Inspection du travail.

 

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Le Pôle “IT & data protection” et le Pôle “Droit social” d’AGIL’IT se tiennent à votre disposition pour vous accompagner en vue de l’élaboration et du déploiement (voire de la mise à jour) de votre charte informatique ou charte d’utilisation des ressources informatiques et de communication.

 

Par AGIL’IT

Laure LANDES-GRONOWSKI, Avocate associée au sein du “Pôle IT & data protection

Sandrine HENRION, Avocate associée au sein du Pôle “Droit social

 

 

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Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 6 – Chambre 8

ARRET DU 25 NOVEMBRE 2020

(nº , 1 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 17/09132 – N° Portalis 35L7-V-B7B-B3WNE

Décision déférée à la Cour : Jugement du 27 Avril 2017 -Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de PARIS – RG nº F15/14672

APPELANTE

Etablissement Public du Parc de la Grande Halle de la Vilette (EPPGHV)

221 avenue Jean Jaurès

[…]

Représentée par Me Frédéric ZUNZ, avocat au barreau de PARIS, toque : J153

INTIMÉ

X…

53, allée des Ormes

[…]

comparant, représenté par Me Evelyne ELBAZ de la SELARL CABINET ELBAZ, avocat au barreau de PARIS, toque : L0107

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 25 Septembre 2020, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Mme Corinne JACQUEMIN, conseillère, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de :

Madame Sophie GUENIER-LEFEVRE, présidente de chambre

Monsieur Benoît DEVIGNOT, conseiller

Madame Corinne JACQUEMIN, conseillère

Greffier, lors des débats : Mme Nolwenn CADIOU

ARRÊT :

– CONTRADICTOIRE

– mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile

– signé par Madame Sophie GUENIER-LEFEVRE, présidente et par Madame Nolwenn CADIOU, greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSÉ DU LITIGE

Y… a été embauché au sein de 1’Etablissement Public du Parc et de la Grande Halle de la Villette (EPPGHV) par contrat de travail à durée indéterminée à effet au 13 février 2012 en qualité de chef de service sécurité au sein de la Direction générale/Sécurité (catégorie Cadre).

L’EPPGHV est un établissement public industriel et commercial qui assure la gestion de l’établissement public du parc de la Grande Halle de La Villette.

La mission de Y… consistait à assurer la sécurité des installations de l’établissement et des visiteurs sur l’ensemble du Parc.

Par courrier recommandé avec avis de réception du 10 juillet 2015, Y… était convoqué à un entretien préalable fixé au 21 juillet 2015, avec mise à pied conservatoire, puis licencié le 24 juillet 2015 pour faute.

Contestant ces mesures et estimant son licenciement dénué de cause réelle et sérieuse, Y… a saisi le conseil de prud’hommes de Paris le 22 décembre 2015, afin de faire valoir ses droits.

Par jugement du 27 avril 2017, notifié le 23 juin 2017, le conseil de prud’hommes de Paris a requalifié la mesure en licenciement sans cause réelle et sérieuse et condamné l’EPPGHV à payer à Y… la somme de 60.000 euros à titre d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse avec intérêts au taux légal à compter du jour du prononcé du jugement outre 700 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

L’EPPGHV a été condamné aux dépens.

Par acte du 3 juillet 2017, l’avocat de l’EPPGHV a interjeté appel dudit jugement.

Dans ses dernières conclusions communiquées par voie électronique le 21 avril 2020, l’appelant demande l’infirmation du jugement et le débouté de l’ensemble des demandes du salarié ou ,à titre subsidiaire, que les condamnations soient limitées à la somme de 28.400 euros brut.

En tout état de cause, l’EPPGHV sollicite la condamnation de Y… à lui verser la somme de 1.000 euros en application l’article 700 du code de procédure civile et à assurer la charge des dépens.

Dans ses dernières conclusions communiquées par voie électronique le 26 mai 2020, Y… demande la confirmation du jugement, sauf sur le quantum de la somme allouée à titre de dommages-intérêts et sollicite de la condamnation de l’EPPGHV à lui verser à ce titre la somme de 120.000 euros.

À titre subsidiaire, il requiert la confirmation du jugement.

En tout état de cause l’intimé demande la condamnation de l’EPPGHV à lui verser la somme de 5.000

euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et à assurer le paiement des dépens.

Il convient de se reporter aux énonciations de la décision déférée pour un plus ample exposé des faits et de la procédure antérieure et aux conclusions susvisées pour l’exposé des moyens des parties devant la cour.

Par ordonnance de clôture du 30 juin 2020, le conseiller chargé de la mise en état a prononcé la fin de l’instruction et a renvoyé l’affaire en audience du 25 septembre 2020.

SUR QUOI

Sur le licenciement

Aux termes de l’article L1232-6 du code du travail alors en vigueur, lorsque l’employeur décide de licencier un salarié, il lui notifie sa décision par lettre recommandée avec avis de réception. Cette lettre comporte l’énoncé du ou des motifs invoqués par l’employeur.

En application de cet article, la lettre de licenciement fixe les limites du litige et c’est au regard des motifs énoncés dans la lettre que s’apprécie le bien-fondé du licenciement.

En l’espèce, la lettre de licenciement de Y… vise :

– une utilisation des outils informatiques à des fins personnelles pendant le temps de travail,

– un comportement « plus général » au sein de l’établissement en faisant référence à 3 griefs :

o ne pas avoir correctement géré l’affaire concernant M.C. en avril 2015,

o avoir tenu des propos déplacés à ses collègues,

o être resté enfermé dans son bureau au lieu d’être sur le terrain.

Au soutien de son appel, l’EPPGHV fait valoir que Y… faisait un usage abusif d’Internet, passant plus de temps sur son ordinateur à des fins personnelles qu’à effectuer la mission pour laquelle il avait été engagé. Il indique également que le salarié a fait preuve d’un désintérêt total dans le management de son équipe, et s’est abstenu de respecter les procédures mises en place.

Y… soutient que les accusations formulées par l’EPPGHV sont infondées, que le mode de preuve utilisé par l’employeur est attentatoire à sa vie privée et doit donc être rejeté en ce que ce procédé de contrôle n’a jamais été porté à sa connaissance antérieurement.

Par ailleurs, l’intimé ajoute que les motifs dans la lettre de licenciement ne sont pas précis et objectifs, le plaçant dans l’impossibilité d’apporter ses observations utiles.

Concernant la licéité des éléments de preuve produits à l’appui du premier grief

Le salarié soutient que l’employeur a procédé au contrôle de données personnelles par un moyen frauduleux et illicite, ce que conteste l’intéressé.

Conformément aux articles L.1121-1, L.1222-4 et L.2323-32 dans sa rédaction alors en vigueur du code du travail, les moyens de contrôle utilisés par l’employeur ne doivent pas apporter aux droits et libertés des salariés des restrictions non proportionnées ni justifiées par la tâche à accomplir ; les salariés doivent être informés notamment de la finalité du dispositif de contrôle et de la durée pendant laquelle les données de connexion à internet sont conservées et le comité d’entreprise doit avoir été consulté préalablement.

De plus, si des procédures disciplinaires sont susceptibles d’être engagées sur la base de fichiers ainsi examinés et conservés par l’employeur, les salariés doivent en être explicitement informés, par exemple, au moyen d’une charte.

En l’espèce, la charte de 2015 (pièce 11 a), qualifiée de «’nouvelle’ comme venant remplacer celle de 2001’» par l’EPPGHV, soumise au comité d’entreprise (pièce nº7 : procès-verbal de la réunion du CE du 5 mars 2015) et communiquée à l’inspection du travail (pièce nº8 : lettre d’envoi à la DIRECCTE du 12 juin 2015) prévoit, en son article 3, que les salariés doivent utiliser internet à des fins privées et autorisées dans des proportions raisonnables.

Il y est également spécifié que l’EPPGHV conservait, conformément aux dispositions de l’article 34-1 et des articles R10-12 et suivants du code des postes et des communications électroniques, les caractéristiques techniques ainsi que la date, l’horaire et la durée de chaque communication.

L’EPPGHV reconnaît que Y… n’a effectivement pas signé cette charte informatique qui n’était pas annexée à son contrat de travail alors qu’il n’est ni démontré ni même soutenu qu’elle était annexée au règlement intérieur de l’entreprise.

C’est pas un moyen inopérant que l’appelant soutient que ce document se trouverait en accès libre sur l’intranet de l’entreprise et que le salarié en a « nécessairement » eu connaissance puisqu’il la verse au débat alors que, d’une part, aucun élément du dossier ne permet d’établir que Y… était en possession de la charte au moment des faits qui lui sont reprochés et que, d’autre part, en tout état de cause la mise sur l’intranet de cette charte ne peut suppléer l’information personnelle et explicite des règles en vigueur.

Il en résulte que le listing de connexions informatiques obtenues ainsi par l’EPPGHV sans respecter les dispositions des articles L.1121-1, L.1222-4 et L.2323-32 n’est pas recevable et ne peut donc constituer un moyen de preuve licite.

Par conséquent, à défaut de preuve de l’existence de connexions démontrant une utilisation excessive de l’internet par Y… à des fins non professionnelles et de leur imputabilité au salarié, le premier grief n’est pas établi.

Concernant le grief lié au mode de management appliqué par Y… au sein du service

En premier lieu, si l’employeur ne conteste pas que Y… a participé à la découverte du harcèlement dont se rendait coupable un autre salarié au sein de son équipe et qu’il a été demandé à l’intimé de faire preuve de la plus grande discrétion le temps d’engager la procédure de licenciement à l’encontre de M. C., il est reproché à Y…, en sa qualité de manager, de ne pas avoir veillé au bien-être de chacun et de ne pas avoir remonté à la direction des ressources humaines les difficultés rencontrées.

Or, le grief tiré de ce que Y… se serait abstenu de communiquer clairement sur le départ de M. C. et n’aurait pas géré son remplacement, «’laissant les membres de son équipe dans l’expectative’», n’est justifié par aucune pièce du dossier alors que, comme le souligne à juste titre l’intimé, cette mission relevait des compétences de la direction des ressources humaines, qui avait procédé au licenciement et qui avait pris en charge la mission de recrutement (pièce 11 du dossier de Y… : email d’information de Mme K.D directrice des ressources humaines).

De plus, l’entrave dont Y… aurait été l’auteur, dans le cadre de l’embauche d’un nouveau salarié, n’est pas davantage établie par l’EPPGHV.

En deuxième lieu, s’agissant des propos déplacés qu’aurait tenus Y… à l’égard de certains de ses collègues, plus particulièrement de ses subordonnés, l’employeur se fonde pour justifier ce grief, d’une part, sur l’attestation de M.G., (pièce nº6) « (‘) La suite, je l’ai vécue moi-même en direct et malgré des entretiens individuels, à l’unisson, les mêmes histoires sur des propos racistes, homophobes, des propos de rabaissement accompagnés souvent de gestuelles déplacées. (‘) Dans la narration de chacun des collaborateurs, il y a concordance et une très grande souffrance ».

Imprécise et non circonstanciée sur la nature des propos tenus, leur lieu et leurs destinataires, cette attestation, qui n’est corroborée par aucun autre témoignage, émane du successeur de Y… qui établissant un bilan, exprime une opinion sur son prédécesseur.

Elle n’établit donc pas l preuve des propos déplacés.

Les comptes-rendus annuels d’évaluation de plusieurs salariés dont se prévaut également l’employeur (pièces 14 à 19) sont également très vagues quant aux reproches faits par certains membres de son équipe à Y….

Or, il ne résulte pas des élément ainsi recueillis par M.G, qui a réalisé les entretiens, que Y… ait tenu des propos déplacés à l’égard de certains de ses collègues, plus particulièrement vis à vis de ses subordonnés comme mentionnés dans la lettre de licenciement ni qu’il restait constamment enfermé dans son bureau.

Aucun exemple de tels propos ou d’une attitude déplacée n’est d’ailleurs mentionné dans les comptes-rendus d’évaluation.

Il résulte de ce qui précède que le grief tiré du comportement inadapté du salarié n’est pas établi.

En conséquence, il convient de confirmer le jugement déféré en ce qu’il a jugé que le licenciement de Y… est sans cause réelle et sérieuse.

Sur les conséquences financières du licenciement

Y…, qui à la date du licenciement, comptait au moins deux ans d’ancienneté dans une entreprise employant habituellement au moins onze salariés a droit, en vertu de l’article L.1235-3 du code du travail dans sa version applicable à l’espèce, à une indemnité qui ne saurait être inférieure aux salaires bruts perçus au cours des six derniers mois précédant son licenciement.

Au regard de son âge au moment du licenciement, 54 ans, de son ancienneté de 3 ans et 5 mois dans l’entreprise, du montant de la rémunération qui lui était versée, de son aptitude à retrouver un emploi au bout de 7 mois eu égard à son expérience professionnelle qui lui a permis d’être embauché selon contrat à durée indéterminée comme intendant dans un établissement scolaire à Marcq en Baroeul (pièce 18 du dossier de Y…), il convient de lui allouer, en réparation du préjudice matériel et moral subi, la somme de 30 000 euros.

Sur le remboursement des indemnités chômage

En application de l’article L.1235-4 du code du travail il convient d’ordonner d’office le remboursement par l’employeur, à l’organisme concerné, du montant des indemnités de chômage éventuellement servies au salarié du jour de son licenciement jusqu’au 26 septembre 2016, jour où il a retrouvé un emploi, dans la limite de 6 mois d’indemnités.

Sur les autres demandes

L’EPPGHV doit être condamné en application de l’article 696 du code de procédure civile aux dépens d’appel et aux paiement à Y… d’une somme de 2000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

CONFIRME le jugement déféré SAUF en ce qu’il a alloué 60 000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse;

INFIRME de ce seul chef,

et statuant du chef infirmé,

CONDAMNE 1’Etablissement Public du Parc et de la Grande Halle de la Villette à payer à Y… la somme de 30 000 euros.

Y ajoutant :

CONDAMNE 1’Etablissement Public du Parc et de la Grande Halle de la Villette aux dépens d’appel ;

CONDAMNE 1’Etablissement Public du Parc et de la Grande Halle de la Villette à payer à Y… la somme de 2000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE 1’Etablissement Public du Parc et de la Grande Halle de la Villette à payer à l’organisme ayant servi des indemnités chômage à Y… du jour de son licenciement jusqu’au 26 septembre 2016, jour où il a retrouvé un emploi, dans la limite de 6 mois d’indemnités.

LE GREFFIER LA PRÉSIDENTE