Une loi va-t-elle autoriser l’activation à distance des téléphones pour nous espionner ? Interview pour BFM TV de notre associée IT & Data, Laure Landes-Gronowski

3 juin 2023 – BFM TV – A l’épreuve des faits  – « Une loi va-t-elle autoriser l’activation à distance de nos téléphones pour enregistrer les conversations ? ». Découvrez l’interview de notre associée, Laure LANDES-GRONOWSKI (pôle IT, Data & Cyber), pour l’émission “A l’épreuve des faits” sur BFM TV.

 

Laure Landes Gronowski bfm activation téléphone

 

Un article du projet de loi d’orientation et de programmation du ministère de la justice suscite la controverse. Il permet d’activer à distance des téléphones mobiles et de localiser ou encore de capter des images ou du son à l’insu de son propriétaire. Interviewée par Agathe Albouy, pour la chronique “La Vérif”” de l’émission “A l’épreuve des faits” sur BFM TV, présentée par Céline Pitelet et Jean-Baptiste Boursier, Laure Landes-Gronowski, notre associée IT, Data & Cyber, revient sur les tenants et aboutissants de ce texte.

 

Que prévoit ce projet de loi d’orientation et de programmation du ministère de la justice en matière d’activation à distance des téléphones portables ?

A date, un certain nombre de dispositifs d’enquête peuvent être utilisés dans les conditions prévues par le code de procédure pénale tels que la mise en œuvre d’interceptions téléphoniques, la mise en place de micros ou de caméras dans des lieux ou véhicules, ou encore l’utilisation de moyens de géolocalisation.

Le projet de loi prévoit un outil complémentaire, à savoir la possibilité de recourir à l’activation à distance d’appareils électroniques, et donc notamment de téléphones portables.

En pratique, ce projet ouvre donc aux enquêteurs deux nouvelles possibilités :

  • premièrement, la possibilité, dans le cadre d’enquêtes ou de d’instructions qui portent sur un crime ou un délit puni d’au moins cinq ans d’emprisonnement, d’activer à distance un appareil électronique, à l’insu ou sans le consentement de son propriétaire ou possesseur, aux fins de procéder à sa localisation en temps réel ;
  • deuxièmement, la possibilité, pour certains crimes ou délits listés par le code de procédure pénal (cf. art.706-73 et 706-73-1) et qui recouvrent une certaine gravité d’activer à distance un appareil électronique, à l’insu ou sans le consentement de son propriétaire ou de son possesseur, à des fins captation, fixation, transmission et d’enregistrement de paroles prononcées par une ou plusieurs personnes à titre privé ou confidentiel, ou de l’image d’une ou de plusieurs personnes se trouvant dans un lieu privé.

Bien entendu, cette activation devra être autorisée par un juge, et être limitée dans le temps (cette limitation dans le temps est prévue d’ailleurs par le texte du projet de loi).

 

Quelles personnes peuvent être concernées par cette activation à distance des téléphones portables ?

Comme en matière de géolocalisation ou d’interceptions téléphoniques, les personnes pouvant être concernées ne sont pas limitées aux personnes soupçonnées d’avoir commis une infraction ; un tel dispositif peut être mis en œuvre à l’encontre de tout individu par exemple dans l’entourage familial ou amical du suspect dès lors que cela peut se justifier par les besoins de l’enquête ou de l’instruction en cours.

En revanche, l’activation à distance d’un téléphone portable ne pourra pas être mise en œuvre sur le téléphone d’un député / sénateur, d’un avocat ou d’un magistrat.

 

Est-ce que cela signifie que micros et caméras pourraient être activés à distance ?

Effectivement, l’activation à distance peut, pour certains crimes ou délits considérés comme particulièrement graves, être autorisée aux fins de captation ou d’enregistrement de paroles ou d’images, ce qui implique la possibilité d’activer le micro ou la caméra à distance.

 

Dans un communiqué, le conseil de l’ordre des avocats de Paris dit : “Le projet n’interdit pas, par leur collecte, l’écoute des conversations dans son cabinet, entre l’avocat et son client, même si leur transcription est prohibée.” Est-ce une atteinte au secret professionnel et aux droits de la défense comme le dit le Conseil de l’Ordre ?

Ici, la difficulté réside dans le fait que, s’il est expressément prévu par le projet de loi qu’il est interdit de mettre en œuvre un tel dispositif sur les téléphones portables des avocats, il est tout à fait possible qu’un tel dispositif soit déployé sur le téléphone portable d’un client qui viendrait échanger avec son avocat, dans son cabinet.

Alors, le projet de loi prévoit que dans une telle hypothèse, c’est-à-dire si les paroles ou images captées proviennent d’un appareil qui se trouve dans un cabinet d’avocats, alors les conversations ne doivent pas faire l’objet d’une retranscription. Toutefois, ce dispositif pourrait tout de même permettre d’écouter les conversations entre l’avocat et son client, effectivement.

 

La rubrique LA VERIF’ sur le sujet  “Une loi va-t-elle autoriser l’activation à distance de nos téléphones pour enregistrer les conversations ?” est disponible dans son intégralité en cliquant ici.

 

 

Par AGIL’IT – Pôle IT, Data & Cyber

Laure LANDES-GRONOWSKI, Avocate associée