Des précisions sur la portée des transactions

Dans un arrêt de la Chambre sociale de la Cour de cassation du 16 octobre 2019 n° 18-18.287, R. c/ Syndicat CFDT union régionale interprofessionnelle de La Réunion, la Cour de cassation a considéré que « la renonciation du salarié à ses droits nés ou à naître et à toute instance relative à l’exécution du contrat de travail ne rend pas irrecevable une demande portant sur des faits survenus pendant la période d’exécution du contrat de travail postérieure à la transaction et dont le fondement est né postérieurement à la transaction. »

Dans cette affaire, un litige opposait une salariée engagée en qualité de secrétaire polyvalente par un syndicat. A la suite d’un différend portant sur la classification indiciaire de la salariée, les parties ont conclu en 2007 une transaction prévoyant le versement d’un rappel de salaire et, à compter du 1er janvier 2008, le classement de la salariée à un nouveau coefficient. L’exécution du contrat de travail s’étant poursuivie, la salariée a saisi la juridiction prud’homale pour le paiement de diverses sommes au titre d’une discrimination salariale.

La transaction est un contrat écrit par lequel les parties, par des concessions réciproques, terminent une contestation née ou préviennent une contestation à naître (article 2044 du code civil). Elle fait obstacle à l’introduction ou à la poursuite entre les parties d’une action en justice ayant le même objet (article 2052 du code civil).

En droit du travail, la transaction permet ainsi de régler un litige ou d’en prévenir un, entre un employeur et un salarié, ce litige pouvant porter sur la rupture du contrat de travail (contestation du licenciement), mais également sur l’exécution de ce contrat (non-respect par l’employeur de ses obligations, défaut de paiement de salaire, application d’une clause, heures supplémentaires, etc.). En effet, il n’est pas nécessaire qu’un contentieux judiciaire soit engagé pour que la transaction soit conclue : il suffit qu’un désaccord existe entre les parties, la transaction ayant ainsi pour objet de mettre un terme à ce désaccord et d’éviter la saisine d’une juridiction.

Lorsqu’une transaction a été conclue à l’occasion de la rupture du contrat, la jurisprudence récente donne plein effet aux clauses de renonciation générale à tout recours lié à l’exécution ou à la rupture de ce contrat (Cass. soc., 5 novembre 2014, nº 13-18.984). Dans l’arrêt du 16 octobre 2019 la Cour de cassation, rappelle ce principe.

Néanmoins, elle précise que cette renonciation générale ne rend pas irrecevable une demande reposant sur des faits et un fondement postérieur à la transaction. Ainsi, si aucune action ne pouvait être engagée au titre du différend réglé par la transaction, la salariée avait la faculté d’engager une action au titre de nouveaux faits discriminatoires subis postérieurement et qui n’ont pas été réglés par la transaction puisque son contrat de travail s’était poursuivi après la transaction.

En définitive, la transaction conclue au cours de l’exécution du contrat de travail ne rend pas irrecevable toute action du salarié jusqu’à la fin de son contrat de travail. Elle évite le contentieux uniquement concernant les différends réglés par la transaction et pour des faits antérieurs à la signature de celle-ci. Les parties doivent, par conséquent, rester vigilantes lorsque le contrat de travail se poursuit puisque tout événement postérieur peut générer un nouveau différend.

 

Par AGIL’ITPôle Droit social
Sandrine HENRION, Avocate associée